Aller au contenu

Portrait d'une Maître des codes dans le monde de l'IA

Marguerite Brac de la Perrière, « Best Lawyer » en biotechnologies et sciences de la vie, est considérée comme l’une des meilleures avocates françaises en santé numérique et protection des données. Rencontre avec une avocate visionnaire.

Marguerite Brac de la Perrière, Avocate Associée chez Fieldfisher - spécialisée en Numérique (IT et Data Protection) et Santé numérique.

Marguerite Brac de la Perrière s'est plongée dans le monde de l'intelligence artificielle après un début de carrière dans le droit de la santé. Sa trajectoire a pris un virage majeur lorsqu'Orange l'a invitée à numériser ce secteur, notamment pour le continent africain. Cette expérience a été un déclic : la technologie ne se limitait pas à modifier les pratiques de travail, elle transformait entièrement le secteur de la santé.

Dès 2009, saisissant l'opportunité offerte par Orange, Marguerite entrevoit le potentiel immense de la santé numérique, bien avant que la pandémie de COVID-19 ne souligne son importance. Avec une conviction ferme dans le pouvoir transformateur de l'IA, en particulier en radiologie et en biologie, elle s'est investie dans ce domaine, développant une expertise qui l'a menée chez Fieldfisher en tant qu'Associé en 2023 après avoir travaillé dans plusieurs cabinets, notamment 10 ans au sein du cabinet Alain Bensoussan Lexing où elle dirigeait la pratique Santé Numérique. Chez Fieldfisher, elle navigue à travers les défis juridiques et éthiques du numérique et de l'IA, conseillant sa clientèle sur la voie de l'innovation responsable, notamment dans le secteur santé.

De medtechs à des groupes de cliniques, en passant par l’industrie et la presse,  je prodigue des conseils stratégiques à une diversité de clients en matière de protection des données, conformité réglementaire et contrats IT. Spécialisée dans les technologies numériques avancées telles que l'IA, je les soutiens également lors d'audits de conformité, de contrôles ou de crises, notamment liées à des violations de données.”

L'engagement de Marguerite envers l'IA est le résultat d'une réflexion profonde sur son potentiel.

"J’ai rapidement compris que l'IA n'était pas seulement une révolution technologique, mais aussi une révolution humaine et éthique. Nous devons encadrer cette technologie pour qu’elle serve le bien commun," souligne-t-elle.

Sa conviction est que l'IA peut transformer positivement de nombreux aspects de nos vies, à condition d'être utilisée de manière responsable. Mais sa réglementation, surtout dans le domaine sensible de la santé, est un véritable casse-tête.

"Chaque avancée technologique apporte son lot de défis réglementaires," explique Marguerite. "Mon rôle est de naviguer dans cet océan de complexités pour trouver un chemin sûr vers l'innovation responsable. Il faut trouver une gouvernance mais qui ne soit pas hégémonique".

Sa passion pour ce travail transparaît clairement quand elle discute des nuances de l'AI Act européen, un sujet qu'elle maîtrise avec une acuité remarquable. On ressent alors l'âme de l'enseignante qui officie à l'Université Paris 8 et à l'Institut pour la Santé Intelligente (INeS) en tant que spécialiste du numérique en santé.

"L'AI Act vise à poser un cadre afin que les Européens puissent avoir confiance dans l'usage des intelligences artificielles autorisées dans le cadre de l'Union européenne. Voici ces objectifs :"

Quels ont été vos plus gros défis ?

"Avec l'IA, les défis sont permanents", me confie Marguerite. "La quête universelle de données dépasse souvent la compréhension de leur utilité réelle. Le vrai défi réside donc dans leur régulation, tout en préservant une flexibilité nécessaire à l'innovation. Il est crucial de faciliter l'accès aux données de santé, sans compromettre leur sécurité.
J’assiste également des industriels de tous secteurs, sur les couches IT et Data, et les couches réglementaires. Notamment de grands groupes dans le secteur de la presse, ce qui nécessite une approche adaptative face aux enjeux réglementaires.
A cet égard, l'établissement d'une charte d'entreprise s'avère fondamental, fournissant des modèles adaptés à chaque organisation. Un mécanisme pour que l’usage soit responsabilisé et conforme à l’IA sans pour autant être bloqué."

Un appel à la responsabilité collective

"En matière d'IA, les conditions de mise en œuvre des exigences réglementaires ne sont pas encore définies. Il s'agit de mettre en place une gouvernance équilibrée, évitant toute domination excessive, tout en promouvant la responsabilité des utilisateurs.Cette démarche vise à responsabiliser les usages de l'IA, assurant une conformité éthique et légale, sans entraver l'innovation. Les acteurs et utilisateurs doivent adopter une démarche responsable, légitimée par une compréhension approfondie des risques associés à l'utilisation de nouvelles technologies, notamment en matière de protection de la vie privée, de cybersécurité et de droits de propriété intellectuelle."
"Chaque utilisateur souhaitant utiliser un nouveau système d’IA doit s'interroger sur les risques liés au secret industriel, à la protection des données à caractère personnel, à la cybersécurité, à l'éthique et aux droits de propriété intellectuelle.Il est nécessaire de démontrer une gestion transparente et sécurisée de ces cinq domaines de risque."

La presse, un bon exemple ?

"Concernant le secteur de la presse, l'adoption de la Charte de Paris sur l'IA et le journalisme est, selon moi, un exemple pertinent."

Marguerite souligne l'importance de distinguer clairement les contenus générés par l'IA, garantissant ainsi une transparence indispensable auprès des lecteurs.

"L'objectif est de canaliser l'innovation, en responsabilisant les acteurs impliqués. S’agissant d’innovation en constante mutation, il faut s'adapter en permanence."

Un défi qui fait pétiller l'œil de l’avocate lorsqu'elle regarde vers l'avenir. Un avenir loin d'être un long fleuve tranquille ...

Dernier