Sam Altman, co-fondateur d'OpenAI et créateur de ChatGPT, a été réintégré en tant que directeur général de l'entreprise. Ce revirement est intervenu après qu'une lettre signée par des centaines d'employés d'OpenAI ait menacé de démissionner en masse, en affirmant qu'ils rejoindraient Sam Altman chez Microsoft si le conseil d'administration en place ne démissionnait pas et ne réintégrait pas Altman.
La trajectoire du père de ChatGPT, figure emblématique de la Silicon Valley ressemble à une série Netflix, truffée de rebondissements aussi inattendus qu'audacieux. Voici un condensé en 7 épisodes.
Épisode 1
Tout a débuté un vendredi 17 novembre, lorsque Sam Altman, alors à la tête d'OpenAI, se voit brusquement démis de ses fonctions lors d'une visioconférence surprise organisée par le conseil d'administration.
Pourquoi une telle décision, moins de 15 jours après le carton plein de l'OpenAI DevDay qui célébrait le succès et les dernières innovations de ChatGPT ?
Le motif de cette éviction reste flou, enveloppé dans un mystère digne d'un thriller.
Connu pour ses idées progressistes et son approche audacieuse de l'innovation, il aurait eu des divergences avec les membres du conseil sur la direction et la gestion de l'entreprise. Selon le conseil, Sam Altman n'aurait pas été totalement transparent dans ses communications, une accusation à peine voilée de malversations. Dans la foulée, Greg Brockman, président de OpenAI, perd son titre mais garde un pied dans l'entreprise. OpenAI annonce alors la nomination de Mira Murati, directrice des technologies, comme directrice générale par intérim. Microsoft et Thrive Capital, principaux financeurs, sont informés de cette décision spectaculaire, les plaçant devant un fait accompli.
Mais dans l'après-midi du 17 Novembre, Greg Brockman annonce sa démission sur le réseau social X.
Pendant ce temps, Microsoft indique dans un communiqué «avoir un partenariat de long terme avec OpenAI, et rester engagé auprès de Mira et des équipes alors que nous allons apporter une nouvelle ère de l'intelligence artificielle aux utilisateurs».
Épisode 2
La sphère technologique reste bouche-bée face au licenciement de la coqueluche de la Silicon Valley. Malgré un week-end tendu et de multiples tentatives de négociations pour faire revenir Sam Altman, le père de ChatGPT a montré une attitude décontractée, partageant une photo de son badge "guest" dans les locaux d’OpenAI. Cette attitude légère contraste avec la déclaration du conseil d'administration, qui a exprimé des préoccupations concernant sa capacité à diriger OpenAI de manière transparente et efficace.
Pendant ce temps, en France, l'enthousiasme pour l'intelligence artificielle ne faiblit pas. Après Mistral AI, fondé par des anciens de Google et Meta, Kyutai émerge, soutenu par des poids lourds comme Xavier Niel, Rodolphe Saadé, et Eric Schmidt. Le ministre délégué chargé du Numérique, Jean-Noël Barrot, voit en Altman une opportunité pour renforcer la recherche française en IA. Mais le parcours d’Altman semble se dessiner bien loin de la Station F.
Épisode 3
À l'issu de ce week-end lunaire, Emmett Shear, ancienne figure de proue de Twitch, se voit catapulter à la tête d'OpenAI. Une élection surprenante au poste de directeur général par intérim, à l'image de cette saga romanesque.
Emmett Shear, après une mûre réflexion, accepte le flambeau, se démarquant des autres candidats approchés comme Nat Friedman, l'ancien stratège de GitHub, et Alex Wang, le co-pilote de Scale AI, qui ont tous deux décliné l'invitation.
Épisode 4
Le feuilleton prend alors une tournure dramatique. Les employés d'OpenAI, indignés, menacent alors de démissionner en masse, transformant la firme en coquille vide.
C'est dans ce climat tendu que Sam Altman accepte une proposition de Microsoft pour diriger une nouvelle unité de recherche en intelligence artificielle.
C'est donc ce lundi 20 Novembre à minuit pétante que Satya Nadella, le PDG de Microsoft, a révélé sur le réseau social X que Sam Altman, Greg Brockman et une sélection de leurs collaborateurs s'apprêtent à intégrer Microsoft.
Ils prendront les commandes d'une unité innovante dédiée à la recherche de pointe en intelligence artificielle.
Épisode 5
Pendant ce temps, du côté d'Open AI, Emmett Shear dévoile sa vision pour les 30 jours à venir, marqués par une enquête indépendante visant à élucider les motifs du licenciement de Sam Altman. Deux heures plus tard, un mouvement de solidarité émerge parmi les employés d'OpenAI, partageant massivement le message « OpenAI n'est rien sans ses membres ». Sam Altman répond avec affection par un émoji cœur.
Quelques heures plus tard, nouveau revirement, et pas des moindres ! Ilya Sutskever, directeur scientifique et membre influent du conseil ayant destitué Altman, exprime ses regrets.
« Je regrette profondément mon rôle dans cette décision. Je n'avais jamais eu l'intention de nuire à OpenAI ».
Ce retournement de situation survient lorsque Microsoft, avec un investissement colossal de 13 milliards de dollars dans OpenAI, pèse de tout son poids pour une réintégration d'Altman. Emmett Shear, directeur général par intérim, joue ici un rôle clé dans les négociations, menaçant de démissionner si le conseil ne clarifie pas les raisons du licenciement d'Altman.
Dans une lettre ouverte adressée au conseil d’administration, le chouchou de la Silicon Valley se voit également soutenir par plus de 500 des 770 salariés d’OpenAI qui menacent de quitter la société s‘il n’est pas réintégré.
«Vos actions mettent en danger notre travail, notre mission, et notre entreprise. Votre conduite démontre que vous n’avez pas les compétences pour superviser OpenAI. Malgré de nombreuses demandes, vous n’avez jamais produit d’explications et de preuves écrites de vos allégations [contre Sam Altman].(...) Nous, les signataires, nous réservons le droit de démissionner et de rejoindre la nouvelle entité de Microsoft», qui leur a fourni des garanties d’embauche.
Il n' y a alors qu'une seule personne qui semble être d'accord avec la décision d'OpenAI.
Épisode 6
Elon Musk, co-fondateur d'OpenAI en 2015 et connu pour ses relations houleuses avec l'organisation, a suscité des réactions en partageant mardi un lien vers une lettre anonyme. Cette lettre, prétendument écrite par d'anciens employés d'OpenAI, accuse Sam Altman et Greg Brockman, l'ex-président du conseil, de malversations dans leur quête de l'intelligence artificielle générale. Bien que les allégations n'aient pas été vérifiées, l'implication de Musk rend la situation encore plus complexe.
Mais lorsque l'on connait les différends entre les deux hommes, nul doute que le fondateur de Tesla et SpaceX a amplifié des accusations pour en tirer partie; sa relation avec Sam Altman s'étant dégradée en 2018, suite à un désaccord sur la prise de participation majoritaire de Musk dans l'entreprise. Elon Musk a alors quitté le conseil d'administration, prévoyant l'échec d'OpenAI. Il a ensuite lancé une entreprise concurrente d'IA, xAI, devenant ainsi un rival direct de Sam Altman.
Épisode 7
Après de multiples rebondissements, un accord est enfin trouvé mardi 21 Novembre. Sam Altman réintègre OpenAI, présidant un conseil d'administration renouvelé, incluant des figures comme Bret Taylor et Larry Summers. Cette volte-face spectaculaire est saluée par Satya Nadella, PDG de Microsoft, qui y voit un pas vers une gouvernance plus stable et efficace pour OpenAI.
«Ceci est un premier pas essentiel pour aller vers la construction d’une gouvernance plus stable, plus efficace, et mieux informée. Sam, Greg et moi nous sommes mis d’accord sur le fait qu’ils ont un rôle central à jouer dans la direction d’OpenAI, afin que cette entreprise continue de briller et puisse remplir sa mission.»
Sam Altman, exprimant son enthousiasme pour ce retour, souligne son unique objectif : "préserver son équipe et la mission d'OpenAI".
Ainsi se clôt, pour le moment, une semaine tumultueuse qui restera gravée dans les annales de la Silicon Valley. Un récit digne de notre époque, où la vitesse et les rebondissements règnent en maîtres.
