Introduction
Le numérique s'est imposé dans presque tous les aspects de nos vies, allant des transactions financières à l'enseignement, en passant par la communication et le divertissement. Malgré ses nombreux avantages, ce secteur a un impact considérable sur l'environnement, à travers la consommation d'énergie, la génération de déchets électroniques et les émissions de gaz à effet de serre.
Souvent sous-estimé par sa nature immatérielle, l'impact numérique est aujourd'hui reconnu et suscite une prise de conscience généralisée. L'incendie du data center d'OVH à Strasbourg a particulièrement mis en lumière la dimension matérielle du digital. Cette question est désormais un sujet politique de premier plan, et ce n'est pas sans raison. "Selon une étude publiée dans la revue Patterns, les téléphones, ordinateurs, télévisions et autres centres de données génèrent entre 2,1 % et 3,9 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), contre 2,5 % pour l'aviation civile" (source: futura-sciences). Ce que confirme le Ministère de la Transition écologique et celui de l’Économie qui ont mandaté l'ADEME et l'Arcep pour évaluer l'impact environnemental du numérique en France. Le rapport rendu le 19 janvier dernier indique que nos activités numériques génèrent 3-4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre et 2,5% de l'empreinte carbone nationale (source Public Sénat). Si cette part demeure modeste comparativement à d’autres secteurs, la croissance fulgurante annuelle de la consommation de numérique (volume de données, terminaux...) inquiète. A horizon 2050, si rien ne change, l’empreinte carbone du numérique pourrait tripler par rapport à 2020 ! (source: l’ADEME et l’ARCEP)
L'empreinte énergétique du numérique
Les centres de données, qui abritent les serveurs assurant le fonctionnement d'internet et des services numériques, sont particulièrement gourmands en énergie. Ils sont nécessaires pour stocker et traiter d'énormes quantités de données, mais requièrent aussi un refroidissement important pour éviter la surchauffe.
Selon Greenpeace, le streaming vidéo représente à lui seul 60 % des flux de données sur internet, en raison du poids des fichiers vidéo. Un film comme Pulp Fiction, proposé par Netflix en très haute définition (4K), pèse autour de 10 giga-octets, soit 300 000 fois plus qu'un email sans pièce-jointe (30 ko). Selon le think tank The Shift Project, la consommation de streaming vidéo (VoD, pornographie, Youtube, réseaux sociaux, etc.) émettrait près de 1% des émissions mondiales de CO₂. Il est prévu que cette consommation augmente considérablement dans les années à venir en raison de la croissance continue des données et de l'utilisation grandissante des technologies de l'IA.
Mais George Kamiya, coordinateur de projets dans les domaines du numérique, de l'énergie et de la mobilité à l'Agence internationale de l'énergie (AIE), tend à rassurer les accros à Netflix. Selon son rapport, en 2019, la vitesse de transmission de données moyenne de Netflix serait six fois moins élevée que celle estimée par The Shift Project, avec 4,1 mégabits par seconde (Mbps) contre 24 Mbps. Cette différence serait due à une confusion entre bit et octet. De plus, l'énergie consommée par les centres de données et le réseau de diffusion de contenu, qui sont utilisés pour le stockage et le transfert d'informations, serait de 7 à 18 fois inférieure.
George Kamiya et The Shift Project arrivent toutefois à des conclusions similaires. "Nous partageons l'inquiétude que les avancées futures dans le domaine numérique (résolution 4K, 8K, etc.) et la croissance de la consommation de vidéos en ligne puissent entraîner une explosion de la consommation d'énergie", souligne Hugues Ferreboeuf; directeur du projet "Lean ICT" au sein de l'organisation The Shift Projec. Pour les utilisateurs, il est conseillé de choisir une résolution inférieure, un écran de taille réduite, de privilégier le Wi-fi à la 4G qui consomme quatre fois moins d'énergie, et enfin de limiter le renouvellement des dispositifs électroniques. "Lorsqu'on considère le cycle de vie complet d'un smartphone, la production constitue les trois quarts de son impact environnemental".
Et c'est précisément la production des appareils numériques (smartphones, ordinateurs, tablettes, etc.) qui est critiquée pour sa consommation vorace d'énergie et de matières premières, tout en produisant des émissions de CO2 de manière plus intense.
Le smartphone, ce complice de tous les jours, est souvent la cible numéro un des campagnes de sensibilisation pour un recyclage accru. Même si, selon Le Monde, les émissions de CO2 liées aux smartphones sont largement sous-estimées par les pouvoirs publics, le site du gouvernement impactco2.fr dévoile un graphique révélateur qui expose le véritable coupable dans notre arsenal high-tech. Préparez-vous à être surpris!
Prenons l'exemple de la production d'un téléviseur qui exige d'extraire 2,5 tonnes de matières premières et qui génère 412 kg de CO₂ . Autrement dit, avant même d’être utilisé, un téléviseur émet plus de CO₂ que votre aller tant attendu vers ce petit Riad tellement typique de Marrakech!
Calculez, pour votre prochain voyage, vos émissions de gaz à effet de serre.
Les déchets électroniques
L'industrie numérique génère d'énormes quantités de déchets électroniques. Selon l'ONU, nous produisons environ 50 millions de tonnes de déchets électroniques par an, un chiffre qui pourrait atteindre 74 millions de tonnes d'ici 2030. Un constat effrayant qui fait écho à d'autres absurdités: en 2022, selon le forum international sur les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). 5,3 milliards de téléphones portables ont été jetés et moins de 20 % recyclés ! La consommation slow motion que l'on pensait possible en sortant du Covid était bien utopique. L'impact de la pandémie de COVID-19 sur nos habitudes quotidiennes a d'ailleurs renforcé notre dépendance aux infrastructures numériques. Le recours croissant à des activités à distance via des connexions en ligne a instauré de nouvelles tendances de consommation.
Les émissions de gaz à effet de serre
L'extraction des matières premières nécessaires à la production des appareils numériques, comme le coltan, l'or, ou l'argent, a également des répercussions environnementales et sociales importantes, avec notamment la déforestation, la pollution des eaux et l'exploitation des travailleurs.
Selon une étude du Shift Project, "l’influence des êtres humains sur le réchauffement de l’atmosphère, des océans et des continents est sans équivoque et principalement due aux émissions de gaz à effet de serre. Le bilan carbone du numérique représente actuellement 3 à 4 % des émissions mondiales de GES", une part qui inquiète surtout par sa fulgurante progression. Mais après des années d'indifférence, le bilan carbone du numérique français sort de l'ombre des politiques publiques, captant désormais une attention bien méritée.
Vers une transition numérique durable
Face à ces défis, il est nécessaire d'adopter une approche de transition numérique durable. Cela implique d'améliorer l'efficacité énergétique des infrastructures numériques, de prolonger la durée de vie des appareils, et de promouvoir le recyclage des déchets électroniques.
Des initiatives comme le Green IT ou l'informatique verte visent à réduire l'impact environnemental du secteur numérique à travers des pratiques plus durables, comme l'éco-conception, le recyclage, l'optimisation de la consommation d'énergie, et la réduction de l'utilisation des ressources. Par exemple, l'éco-conception des sites web et des logiciels peut permettre de réduire leur consommation d'énergie en minimisant le volume de données à traiter et à transférer.
De même, les entreprises peuvent adopter une politique de "hardware durable", en privilégiant l'achat d'équipements économes en énergie, en prolongeant la durée de vie de leurs appareils par la réparation et la mise à niveau, et en recyclant correctement leurs déchets électroniques.
Il est également important de sensibiliser les utilisateurs à l'impact environnemental du numérique. Par exemple, le streaming vidéo en haute définition, les emails avec de grandes pièces jointes, et une mauvaise utilisation du cloud contribuent à la consommation d'énergie du secteur numérique. Adopter des pratiques plus respectueuses de l'environnement, comme regarder des vidéos en basse définition ou compresser les pièces jointes peut contribuer à réduire notre empreinte numérique.
Selon les experts, il est également important de développer des politiques et des régulations favorisant la transition numérique durable. Parce qu'on le sait, l'être humain peut parfois emprunter la voie de la facilité ! Cela peut inclure des normes d'efficacité énergétique pour les appareils numériques, des incitations pour le recyclage des déchets électroniques, et des critères de durabilité pour l'achat public de matériel informatique. De nombreux organismes de recyclage ont vu le jour ces dernières années, ayant pour leitmotiv d'offrir une seconde vie à ces déchets et de lutter ainsi contre l'obsolescence programmée. Débarrassez-vous de vos déchets électriques grâce à des éco-organismes certifiés comme Ecologic. Assurés par l'État, ils transformeront vos vieux équipements en matériaux recyclés, vous libérant de toute responsabilité juridique !
Les nouvelles technologies au secours de la planète ?
Bien que le secteur numérique soit réputé pour sa grande consommation de ressources naturelles, il est aussi celui qui recèle le plus grand potentiel pour la décarbonation à l'échelle mondiale. Ce secteur est un acteur clé de la transition vers un avenir plus vert, mais tout est une question d'équilibre et de perception éclairée. Pour arriver à trouver ce point d'équilibre, plusieurs facteurs sont à placer dans la balance, en commençant par une gestion énergétique plus efficace, une conception et un usage plus durables des équipements, une gestion appropriée des déchets électroniques, sans oublier la sensibilisation des utilisateurs et les mesures importantes que doivent apporter nos décideurs.
Par exemple, plusieurs technologies de refroidissement innovantes ont été mises au point pour les data centers afin d'augmenter leur rendement énergétique et diminuer les dépenses opérationnelles. Lorsque l'on sait que les 800 data centers de Californie consomment chaque année autant d'eau que 158 000 piscines olympiques et que ces eaux, souvent traitées puis évacuées dans les égouts présentent un coût écologique, humain et financier important, il était temps d'apporter de réelles solutions ! Parmi elles, on retrouve différentes techniques de refroidissement: par immersion, le refroidissement à air extérieur, le refroidissement par évaporation, le refroidissement par eau de mer, le refroidissement adiabatique, par air liquide ou encore par capteurs thermiques.
Face à l'impact du béton, responsable de 8% des émissions de CO2 mondiales, Microsoft prend le taureau par les cornes en imaginant des data centers construits avec de la terre, des algues et du chanvre, véritables pièges à carbone. Une initiative que l'on ne peut que saluer ! De son côté, Bill Gates se prépare à jouer un rôle clé dans la vaste initiative du Congrès pour les infrastructures climatiques. Son fonds dédié à l'investissement climatique met sur la table une impressionnante somme de 1,5 milliard de dollars pour un partenariat entre secteurs public et privé. Quant à Elon Musk, il promet lui une récompense gargantuesque de 100 millions de dollars à quiconque inventera la technologie de capture du carbone la plus efficace ! À bon entendeur ...
La révolution verte serait-elle en marche ?
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